• Féminisme, apparence ou réalité ?

    Parmi les nombreux textes soumis à la réflexion pour le 36ème congrès, qu'ils soient globaux ou thématiques, l'un d'entre eux a subi un traitement spécial, au point de l'extraire des textes à discuter pour le placer en exergue, comme s'il allait de soi : c'est la contribution sur le féminisme.

    Pourtant, il y aurait à dire sur ce sujet ! Combien parmi nous (hommes et femmes confondus) se contentent, dans leurs écrits, de rajouter un "E" subreptice ou ostensible (voire ostentatoire) à chaque mot masculin, ou de lui accoler son redondant équivalent féminin, pour bien montrer qu'il est féministe, lui aussi…

    Ce féminisme d'apparence, outre le fait qu'il massacre allègrement la langue française, est particulièrement vicieux.

    Allié à un paritarisme mécanique, il fait l'impasse sur les idées et les valeurs humaines : la qualité de femme ressort prioritairement, au détriment des  qualités propres de cette personne. J'ai trois bonshommes d'un côté, je rajoute vite trois femmes sur l'autre plateau de la balance, mais quid de leurs compétences, de leurs qualités ?

    Dans le même sac figurent l'ouvrière, la chômeuse, la militante, mais aussi la politicienne de droite (Lagarde, NKM, Le Pen…) ou l'abstentionniste.

    Lisons ce qu'écrit Baptiste Eychart, dans sa critique du livre de Nancy Fraser, "Le féminisme en mouvement" dans le supplément à l'Huma du 6 décembre (Les Lettres Françaises) :

     

    Ce qu'il est convenu d'appeler la classe dirigeante des pays occidentaux (en bref les tenants du capitalisme) a intégré certains aspects du féminisme, non seulement pour approfondir les mécanismes d'exploitation, mais aussi pour mieux consolider sa domination politique et économique. Mettre une femme à la tête de la principale organisation patronale, comme en France, ou d'un gouvernement de choc en lutte contre les syndicats et les travailleurs, comme en Grande-Bretagne est devenue une stratégie politique tout à fait courue.

    Si le féminisme est réduit à une simple lutte pour la reconnaissance de l'identité sexuée et de la différence de genre, il ne met pas en péril le système.

     

    Je suis d'accord avec cette analyse, le féminisme tel qu'il se développe actuellement perd de sa force critique en se polarisant sur la forme visible mais superficielle de la différenciation sexuée, et cela en martyrisant les règles élémentaires qui régissent la langue. On en arrive même à des aberrations telles que l'ajout d'un "E" incongru à des mots masculins en "eur" au mépris de la grammaire, sur la suggestion de nos amis Québécois, que l'on a connus plus inspirés par le passé dans la défense de la francophonie.

    Rappelons que le "e" est une des marques du féminin, mais ni la seule, ni obligatoire. Nulle part nous n'écrivons la fleure, la douceure ou la minceure…

    Je regrette que nos camarades lettrés, dans le Parti, qu'ils soient sociologues, philosophes, profs ou grammairiens, bref les intellectuels, n'insistent pas plus sur l'inanité de cette détérioration de l'orthographe, qui n'est qu'un artifice, une puérilité qui ne fait que troubler la notion de féminisme vrai. Peur d'affronter nos camarades femmes sur cet aspect ? Volonté de ne pas en faire une polémique ?

    Alors, dénonçons les mauvais traitements faits aux femmes, dénonçons les coups et les viols, luttons pour qu'elles aient toute leur place dans la société, pour des salaires égaux, pour une reconnaissance effective, mais arrêtons les puérilités de langage qui sont vraiment contre productrices.

    Le féminisme ne doit pas être seulement une dénonciation de notre système androcentrique et phallocrate, même si elle est nécessaire, mais il doit aussi et surtout s'ancrer durablement dans la critique du néolibéralisme, pour l'émancipation humaine en général, afin d'être vraiment efficace.

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